Paroles d'enseignants avec lesquels j'ai travaillé

claireleconte Par Le 09/07/2019

Argumentaire  des collègues de maternelle en « expérimentation » depuis 17 ans au moment où la réforme Peillon a été mise en place. Ils ont une organisation sur un modèle de 5 matinées de 4 heures, puis deux après midi de deux heures et deux après midi pour des parcours éducatifs (évitant l’émiettement des temps chaque jour et la succession de ruptures et transitions).
Aujourd’hui, en 2019, ils ont toujours la même organisation, soit 23 ans après. 

École maternelle De Comines à Lille – Janvier 2013
Avec le recul de dix-sept année d’expérimentation d’un nouvel aménagement des temps de l’enfant, il est évident que les quatre heures matinales sont à la fois très aisément assimilables par les enfants, mais également très profitables pour les apprentissages scolaires.
En effet, avec la coupure à 10h00 pour prendre une collation, les enfants peuvent tenir sans difficulté jusqu’à 12h30 pour prendre leur repas. De plus, ils sont très concentrés le matin pour les apprentissages, d’autant plus qu’ils savent que les après-midi sont moins chargés quand il y a l’école, et ludiques avec les activités. 
Ainsi, il est aisé de les solliciter et de leur demander une concentration soutenue durant la matinée, à tel point que les résultats scolaires des enfants, même dans un quartier dit « en difficulté », sont très prometteurs.
Avec l’alternance des différents moments dans la matinée, il n’y a pas de phénomène de lassitude. De plus, grâce aux activités menées deux après-midi par semaine, les enfants sont habitués non seulement à côtoyer des personnes différentes, mais également des lieux divers. Ainsi, à chacune de nos sorties, que ce soit dans des musées, des spectacles ou des lieux de patrimoine, l’attitude des enfants est systématiquement remarquée : calmes, attentifs, intéressés, ils ne sont pas consommateurs mais bien acteurs de chacune des sorties.
Ce qui amène les personnes accueillant ces élèves dans les lieux des visites à dire aux enseignants qu’ils peuvent revenir quand ils veulent avec ces enfants.
Il est à noter que dans les classes des petits et des moyens, les heures de siestes nécessaires s’étalent beaucoup moins sur les heures scolaires, et les enfants ont donc plus de temps de classe et de moments de sollicitation des différents adultes qui s’occupent d’eux.
La conclusion paraît évidente : toute modification de ce rythme particulièrement bien adapté aux jeunes enfants et aux apprentissages sera perçu, par les enfants, les parents et les enseignants, comme une régression pédagogique.
Janvier 2013

Argumentaire des collègues de cette maternelle toujours en « expérimentation » deux ans plus tard, sur un modèle de 5 matinées de 4 heures, puis deux après midi de deux heures et deux après midi pour des parcours éducatifs (évitant l’émiettement des temps chaque jour et la succession de ruptures et transitions), réalisés par des animateurs qualifiés.


Un collègue de GS
Pour que ce système fonctionne, il faut une vraie adhésion et un véritable investissement, de la part des enseignants, des enfants et également des parents.
Si ces derniers ont conservé un rythmé syncopé de coucher pendant la semaine, les enfants ne peuvent pas être en forme, or c'est dans ce cas « forcément la faute du système ».
Moi, j'en suis convaincu : quatre heures le matin, ce n'est pas un problème. On en arrive même, avec Mme G., à descendre en retard tous les jours en récréation parce que les enfants sont en plein travail et ne demandent pas à s'arrêter.
J'ai eu une inspection ce matin de Mme L., qui a été absolument enchantée de voir les enfants s'activer, travailler, apprendre et réclamer encore et toujours du travail dès qu'ils avaient fini.
Elle a été emballée de voir leur disponibilité et leur envie.
Conséquence évidente d'une autre manière de faire, d'un autre rythme et d'une disponibilité plus grande des enseignants.
Je n'avais aucun souci pour répondre à leurs sollicitations, puisque je savais qu'à 12h30, j'avais fini

 

En 2011 la ville de Lomme m'a demandé de les accompagner pour mettre en place un projet expérimental dans un de leurs groupes scolaires volontaire. Nous y avons travaillé tous ensemble de 2011 à 2012 et il s'est mis en place à la rentrée 2012. 

Comité de suivi de Lomme le vendredi 3 mai 2013 (mise en place du nouvel aménagement à la rentrée 2012). Soit en fin de première année de fonctionnement nouveau.
Premier rendu de Claire Leconte.

Je suis en train de mener les évaluations de la première année de fonctionnement du projet à Lomme comparées à celles réalisées l’an passé, avant la mise en place du projet : ce que j'ai recueilli pour l'instant montre à quel point nous avons eu raison de choisir le type d'organisation que nous avons choisi.


Les parents sont tout à fait ravis de l'expérience, les enfants sont maintenant beaucoup plus heureux de venir à l'école, quant aux enseignants, tous reconnaissent avoir une qualité de vie professionnelle largement améliorée, qui leur permet plus de disponibilité pour s'intéresser à leurs élèves hors de la classe, les enfants travaillent mieux, plus vite, sont plus disponibles, deviennent très curieux au bon sens du terme, sont attachés aux animateurs qu'ils ont sur de longues périodes puisque ce sont toujours les mêmes qui viennent les chercher pour le repas, etc, pas de turn-over de ces animateurs, bref, une seule envie, pouvoir continuer à fonctionner ainsi.

Pour la classe des tout petits, la maîtresse dit ne pouvoir que constater que les élèves ont avancé beaucoup plus vite dans les apprentissages que les autres années alors même qu'au contraire, elle les laisse avoir plus de temps pour aller au bout de leur activité, car la longue matinée le permet.
Quant à la directrice d'élémentaire de Lomme, qui était venue témoigner à la soirée organisée par les parents d'élèves de la ville d’Hellemmes, voici ce qu'elle m'écrivait hier : « j'entends les parents louer l'ouverture culturelle, la richesse des projets, le plaisir de venir à l'école (Mme B., maman très protectrice me disait hier soir que ses enfants réclament pour aller à la cantine, à l'école, que ce n'est pas un problème d'aller à la garderie comme hier soir , ce qui aurait été impensable l'an dernier). Cela m'a donné l'envie de continuer. »

Cette directrice, par ailleurs maîtresse de CP, me disait en décembre qu’elle constatait bien avoir beaucoup d’avance dans ses programmes avec des enfants bien plus à l’aise dans leurs apprentissages. Elle disait également que ce projet  a permis à l’équipe enseignante de retrouver l’essence même de leur métier.

Paroles d’une enseignante de CE2 :
« Travail à 3⁄4 temps, beaucoup d’élèves difficiles dans l’école y compris un dans ma classe en particulier.
J’ai beaucoup apprécié le fait de pouvoir partager plus de temps informels avec mes collègues, notamment les lundi et jeudi après midis.
Comme noté plus haut, j’apprécie cette organisation (même si le ‘temps libre’ des lundi et jeudi est un faux temps libre : nous restons presque tous travailler à l’école). J’ai le sentiment de mieux faire mon travail, je suis plus sereine dans mes préparations et mes corrections, je prends le temps de parler de mes élèves avec les collègues, je fais moins de choses dans l’urgence.
En fait, même à temps partiel, j’ai rallongé mon temps de travail ... (Bien souvent je viens travailler le vendredi à l’école pour préparer, corriger, alors que c’est mon jour de décharge). Et je ne travaille pas moins à la maison !
J’aime beaucoup travailler le mercredi matin. Les élèves sont disponibles, j’ai le sentiment de faire du bon travail. (Comme quand on travaillait le samedi).
Personnellement je ne peux qu'espérer qu'il pourra en être ainsi pour tous les enfants dont on dit partout qu'ils vont "bénéficier" des nouveaux rythmes. »

 

Retour d’une collègue du groupe scolaire d'une commune du sud-ouest, dans la région de Bordeaux.
 

Nous  avions  travaillé  ensemble  lors  de  la  mise  en  œuvre  de  la  réforme,  et  très  vite  ces  enseignants avaient accepté d’allonger leur matinée d’apprentissages.  
Je  les  avais  alors  conseillé  sur  l’organisation  à  faire  pour  que  ces  matinées  servent  au  mieux tous les enfants.  

  Ayant eu un déplacement dans le sud-ouest pour une conférence, ces enseignants m’ont  demandé  de  passer,  à  cette  occasion,  dans  leur  école  pour  à  la  fois  constater  ce  qui  fonctionne  bien  mais  aussi  leur  donner  quelques  conseils  supplémentaires  pour  améliorer encore la vie des enfants, ce que j’ai évidemment bien accepté de faire.   

Voici le retour que j’en ai eu suite à cette rentrée 2015.  
 
« En  ce  qui  concerne  notre  nouvelle  organisation  avec  l’accueil  échelonné  le  matin  (10  mns) et en début d’après-midi (15 mns) c’est vraiment super.   Tout le monde apprécie, les élèves et les enseignants.  
Ces  deux  moments  permettent  un  retour  en  classe  calme,  en  musique  puisque  c’est  le  signal que l’on peut entrer en classe.   
En ce qui me concerne, je propose à mes CM2 un retour en arrière puisqu’ils ont le choix  entre  coloriage,  perles  à  repasser,  puzzles,  pâte  à  modeler  et  (ce  que  certains  adorent)  lecture d’albums.   J’ai récupéré une chauffeuse de ma dernière fille, ils la déplient, ils se couchent dessus et  certains ferment même les yeux.  
Encore  merci  pour  vos  informations  et  je  souhaite  un  jour  que  tous  les  enseignants  se  souviennent qu’ils sont au service d’enfants et d’ados plutôt que de penser l’inverse ». 
 
Conclusion, quand on veut, on peut !


J’ai accompagné la mise en place du projet éducatif sur le pays fléchois, c’est donc un projet intercommunal, sur 25 communes que nous avons construit, tous ensemble, sur la base d’une organisation identique, ce qui permet à chaque enfant, quel que soit son lieu de vie, de participer à des parcours de découverte de grande qualité quand le temps est libéré par l’école, puisque nous mutualisons les ressources.


Une commune en particulier a innové plus encore puisque les enseignants du groupe scolaire ont accepté d’intégrer leur heure d’APC dans leur emploi du temps, pour éviter des débordements à des moments peu propices. 

Nous avions un comité de suivi sur le pays fléchois et j’avais décidé de diffuser les emplois du temps que m’avait envoyés la directrice de l’école de Cré.
Elle était malheureusement absente à la réunion et je l’ai prévenue que j’avais malgré tout diffusé ses emplois du temps.

Voici quelle fut sa réponse :
« Bonsoir,
Il n'y a aucun souci.
Je suis désolée de ne pas être présente mais nous avons été prévenus trop tard de cette réunion et la date de notre conseil d'école était déjà fixée au même moment.
N'hésitez pas à appuyer au nom de l'école de Cré sur la pertinence de ces rythmes pour le bien des enfants.
Bonne soirée I. B. »


Plus récemment j’ai accompagné diverses communes de l’agglomération de Montauban. 
Nous avions une réunion avec les élus et voici la lettre qu’a envoyée à l’une de ces élues une directrice d’école dont les collègues et parents ont décidé de suivre les préconisations que j’avais faites lors d’une conférence. 

Salvagnac, le 30/11/2018
TÉMOIGNAGE DE MADAME V., DIRECTRICE À L’ÉCOLE DE P.

Je vous livre ici la lettre de cette collègue :

« Madame V. a assisté à la conférence de Claire Leconte en février dernier, sur les rythmes biologiques des enfants.
Très sensible à son analyse, elle a poursuivi des recherches sur son travail via internet et a décidé de mettre en application ses préconisations.
Les parents, à l’écoute de son projet, ont visionné les conférences de Claire Leconte sur Internet et ont été ouverts aux différents changements, notamment celui des horaires qui favorisaient les matinées longues et des parcours de découverte le jeudi après-midi.

Avec seulement 3 mois de recul, elle considère le changement « fabuleux ».

L’instauration de ces parcours, le travail en collaboration avec les personnels de l’ALAE a permis de donner du sens à la relation école/ALAE, a créé du lien. Madame V. considère que le bénéfice est « flagrant ».
Après interrogation des parents et accord avec la FEDERTEP, les enfants quittent l’école 1 h plus tôt qu’auparavant, soit à 15h45.

Ces nouveaux horaires font suite au réaménagement de l’emploi du temps avec matinées plus longues, une récréation avant 10h, plus d’appétit pour le repas de midi. Les matières à haute mobilisation cognitive sont bien sûr dispensées le matin.

D’autres aménagements ont été décidés suite aux préconisations de Claire Leconte, celui d’un temps de relaxation de 10 minutes, juste après le repas, suivi d’un temps de repos ou de jeux calmes.
De petits investissements ont été réalisés tels que l’acquisition de jeux anciens, en bois, réduisant l’excitation des enfants. L’installation de claustras va quant à elle, permettre de créer des espaces plus intimes et moins bruyants, que ce soit dans la salle de restauration ou dans le préau.
Avec l’apport de coussins et couvertures, l’utilisation du préau évolue. Les enfants se détendent, sans énervement, sans bousculade, mais il faudra bientôt aviser parce que l’espace n’est pas chauffé.

La demande prioritaire de Madame V. est la venue de Claire Leconte dans son école, pour qu’elle échange avec les enfants et les parents très en demande.

C’est une sorte de révolution qui se met en marche dont le bénéfice est indéniable pour les enfants mais aussi pour les collègues, disposant de plus de temps pour travailler dans la semaine et profitant plus largement de leur week-end et de leur famille. ».

Que dire de plus, la refondation de l’école espérée des précédents ministres est là bien en marche, pourquoi toutes les écoles n’en ont-elles pas profité ? 
Ces collègues n’ont fait que me faire confiance et suivre toutes les préconisations que je n’ai cessé de diffuser.
Aujourd’hui, c’est à un gâchis auquel on assiste et c’est désolant.